Non, ça n'est pas le titre du dernier ouvrage de philosophie que je suis en train de lire.
Mais cette Shannon River est bien une
sorte de paradoxe, qui réunit sur les flancs de son estuaire et de
ses premiers milles, une préfiguration de l'enfer et du paradis.
9H30, je sors de l'écluse de Killrush.
L'eclusière ( non, non, pas un éclusier) me lance un jovial «bon voyage» accompagné de signes de la main, comme s'il était nécessaire de confirmer que la qualité d'accueil des irlandais n'est pas un vain mot.
Mes hollandais font la même route que
moi, même destination «Paradise», on est au moteur pour remonter
car il n'y a pas de vent. Une vingtaine de milles à faire.
Je disais paradoxe. Déjà, quand
j'étais arrivé avant-hier sous la pluie, avec peu de visibilité,
j'avais une une curieuse impression d'une espèce de St Nazaire
irlandaise avec ses deux ou trois tankers au mouillage en rade de ce
grand estuaire et des hautes cheminées au loin..
Shannon River, le plus grand fleuve
irlandais, mélange les genres entre belle nature verdoyante et
infrastructure industrielle. Un impression d'estuaire de la Loire, en
moins dense industriellement mais tout de même.
L'enfer:
Juste après Killrush, déjà, on a la
Centrale électrique au charbon avec son quai où
doivent venir s'amarrer des tankers pour l'alimenter en charbon.
Quelques milles plus loin, c'est
l'ancienne centrale au mazout, qui a l'air bien délabrée, celle au
charbon l'a remplacée manifestement, à la suite du choc pétrolier
des années 70/80.
Puis encore plus loin, à peu près à
la hauteur de là où je bifurque à gauche dans la Fergus River
c'est l'usine d'aluminium, une des ou la plis grande d'Europe semble t'il. Donc des tankers aussi, qui apportent de
la bauxite venant d'Afrique de l'Ouest, à raffiner pour produire
l'alumine, et pour laquelle des associations locales s'inquiètent
des effets polluants de la bauxite dans ce milieu naturel.
La centrale au charbon
La raffinerie de bauxite pour la production d'aluminium
Et son terminal pour les tankers
Le paradis :
Déjà, au niveau de Killrush, c'est
l'univers des bateaux de ballade à touristes pour aller voir les
dauphins, et c'est vrai qu'il y en a dans l'estuaire et que le coin
est réputé pour ça, c'est même un des emblêmes de cette petite ville, et j'en ai eu à mes côtés lors de mon arrivée.
Puis au fil de la remontée de la
Shannon River, ce sont de doux paysages de collines et de bocages où
une des activités majeures agricoles est l'élevage, pour la viande
et pour le lait.
En gros c'est l'enfer à ma droite, le
paradis à ma gauche, ou l'inverse selon la position d'avancement
dans la remontée..
Malgré tout, hormis les
infrastructures industrielles, je n'ai croisé quasiment personne
pendant cette remontée … ça ne respire pas la suractivité
maritime non plus...
J'exagère peut-être un peu sur l'enfer mais comparé à la beauté fondamentale du reste.... et puis essayez donc d'installer une centrale au charbon à Port Navalo et une usine d'aluminium à ... Larmor Baden, au hasard pour rigoler , et vous verrez si on ne vous parle pas d'enfer ...!
J'exagère peut-être un peu sur l'enfer mais comparé à la beauté fondamentale du reste.... et puis essayez donc d'installer une centrale au charbon à Port Navalo et une usine d'aluminium à ... Larmor Baden, au hasard pour rigoler , et vous verrez si on ne vous parle pas d'enfer ...!
14 heures, j'entre dans la River Fergus, la porte du «Paradise»
Le courant semble vouloir me retenir,
5,6 noeuds de vitesse surface pour 3,2 voire moins en vitesse fond,
le moteur est à la peine.
Puis c'est le labyrinthe des passages
étroits et peu profonds entre les iles, îlots, cailloux, langues de
sables, et les courants associés.
Un oeil sur le sondeur, un oeil sur la
carto, et un oeil ( oui, oui, le troisième oeil) sur la conduite du
bateau dans les courants qui font penser étrangement à ceux du
Golfe du Morbihan … en fait pour un Morbihannais ça a comme un air
de déjà vu. Par moments tout de même, houlà, c'est pas large là,
et ya pas beaucoup d'eau, allez on y va en douceur.
15 heures,la pioche est plantée dans
la vase du "Paradise", mes hollandais sont mouillés à une encâblure,
silence total et absolu sauf quelques chants d'oiseaux …
Nomade champêtre.
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